Nées dans un Japon en reconstruction, les Kei Cars (Keijidosha (軽自動車, « véhicule léger »)) ont su traverser les décennies en évoluant avec leur époque. Véritables symboles de mobilité urbaine compacte et économique, elles incarnent un pan unique de l’histoire automobile japonaise, façonné par des choix politiques, des contraintes économiques et un environnement routier bien particulier.
Les origines des Kei Cars (1948–1975)
Un besoin économique et social
Après la Seconde Guerre mondiale, le Japon est confronté à une crise économique majeure. La population a peu de moyens et les infrastructures sont endommagées. Beaucoup possèdent un deux-roues, mais l’accès à une voiture reste hors de portée pour la majorité. Pour stimuler la reprise industrielle et offrir une alternative abordable à la voiture traditionnelle, le gouvernement crée une nouvelle catégorie : les Keijidōsha, ou véhicules légers.
Dès 1949, les premières normes sont établies, limitant la cylindrée des moteurs à 150 cm³ (ou 100 cm³ pour les moteurs deux temps). Cette classification permet aux constructeurs de proposer des véhicules abordables bénéficiant de taxes réduites, tout en répondant aux besoins de transport quotidien des familles et des petits commerçants.
Vers une production plus viable
La réglementation évolue rapidement pour rendre les Kei Cars plus attrayantes : en 1955, la cylindrée est portée à 360 cm³, ce qui marque le véritable lancement de cette catégorie. C’est à cette époque que Suzuki dévoile la Suzulight, et que Subaru lance la célèbre Subaru 360, deux modèles devenus emblématiques. Ces voitures répondent à un besoin fondamental : une mobilité simple, économique et adaptée aux routes étroites du Japon.
Le gouvernement, par l’intermédiaire du MITI (Ministère de l’Industrie et du Commerce international), établit aussi un objectif ambitieux : le développement d’une “voiture nationale”, plus grande que les Kei Cars. Cela pousse les constructeurs à faire un choix stratégique : investir dans le segment des Kei ou s’orienter vers des véhicules plus spacieux.
L’essor technique et commercial
Les années 1960 voient une amélioration constante des performances et du confort. En 1968, Honda révolutionne le segment avec le N360, qui booste le marché des voitures particulières. En quelques mois, les ventes explosent. En parallèle, les équipements s’enrichissent : boîtes automatiques, freins à disque, et moteurs de plus en plus puissants, jusqu’aux 40 chevaux du Daihatsu Fellow Max SS.
En 1970, les ventes atteignent un record de 750 000 unités. Mais ce succès reste fragile, car de nouveaux défis apparaissent.
Le passage à l’ère 550 cm³ (1976–1990)
Resserrement réglementaire et chute des ventes
Au milieu des années 70, la situation se complique. Le gouvernement réduit progressivement les avantages fiscaux accordés aux Kei Cars. À cela s’ajoute une série de normes antipollution très strictes, particulièrement difficiles à satisfaire pour les petits moteurs de 360 cm³. Les ventes chutent : en 1975, le marché ne représente plus que 150 000 voitures particulières, soit une baisse de 80 % par rapport à 1970.
Honda et Mazda se retirent temporairement du segment des voitures particulières, bien qu’ils continuent de produire des véhicules utilitaires.
Une réponse politique et industrielle
Face à l’impasse, les constructeurs et le gouvernement s’accordent sur un compromis. À partir du 1er janvier 1976, la limite de cylindrée passe à 550 cm³, tandis que la largeur et la longueur maximales sont également revues à la hausse. Daihatsu est le seul constructeur prêt à temps, avec un moteur de 550 cm³ déjà développé.
Les autres marques introduisent d’abord des modèles de transition entre 443 et 490 cm³, avant de proposer des moteurs pleinement optimisés pour la nouvelle limite.
Exportations et adaptation du marché
Cette période marque aussi le début d’une exportation croissante, notamment pour les petits camions. En 1980, les exportations atteignent un nouveau sommet, portées principalement par les microtrucks. Le Chili devient l’un des principaux marchés d’exportation, devant l’Europe.
Dans un contexte économique difficile, les constructeurs redoublent d’ingéniosité pour séduire la clientèle. Suzuki lance en 1979 l’Alto, un modèle à bas coût vendu comme utilitaire léger pour éviter la taxe d’accise de 15,5 %. Ce modèle devient une référence et oriente tout le marché des années 80.
Confort, technologie et diversification
Au fil de la décennie, les Kei Cars s’embourgeoisent : climatisation, vitres électriques, turbo, transmission intégrale… Des versions “van” dérivées des citadines sont proposées aux particuliers, profitant d’une fiscalité encore plus avantageuse. Suzuki, Subaru et Daihatsu multiplient les variantes, avec les Alto, Rex et Mira.
La vitesse maximale autorisée pour ces véhicules passe à 80 km/h, mais un avertisseur sonore est imposé en cas de dépassement.
L’ère 660 cm³ et la maturité (1990–2014)
Réforme majeure et essor technologique
En 1990, les limites sont à nouveau révisées : cylindrée portée à 660 cm³, longueur maximale augmentée de 10 cm. Cette réforme intervient pendant la bulle économique japonaise, et les constructeurs s’empressent de renouveler leurs gammes. La puissance est désormais plafonnée à 64 chevaux, afin d’éviter une escalade incontrôlée.
Toutes les marques s’alignent rapidement. Le segment devient très concurrentiel, et certains modèles comme le Suzuki Wagon R dominent les ventes pendant des années. À noter l’apparition du Smart K, une version adaptée du Smart Fortwo vendue au Japon, bien que son succès reste très limité.
Domination des modèles familiaux
La catégorie devient si populaire que des modèles comme le Honda N-Box, la Daihatsu Move ou le Suzuki Alto deviennent omniprésents sur les routes japonaises. En 2011, Toyota entre sur le marché avec la Pixis Space, issue d’un partenariat avec Daihatsu. Mitsubishi et Nissan collaborent également pour créer l’eK et ses variantes.
Les Kei Cars représentent jusqu’à 40 % des ventes nationales à certains moments, prouvant leur pertinence sur le marché intérieur.
Période post-avantages (2014 à aujourd’hui)
Réduction des avantages fiscaux
En 2014, le gouvernement réduit les avantages accordés aux propriétaires de Kei Cars : hausse de la taxe à l’achat, augmentation des taxes sur l’essence et des impôts spécifiques. L’écart de fiscalité entre une Kei Car et une voiture classique se réduit nettement, impactant les ventes.
Malgré cela, les principaux acteurs du segment (Suzuki, Daihatsu, Honda, Nissan-Mitsubishi) continuent d’y croire. Toyota, Mazda et Subaru s’en remettent à des modèles rebadgés pour maintenir leur présence.
L’arrivée des Kei Cars électriques
Le tournant écologique n’épargne pas les Kei Cars. Mitsubishi ouvre la voie en 2009 avec l’i-MiEV, première Kei Car électrique de série. Elle propose une autonomie allant jusqu’à 160 km, mais reste coûteuse pour l’époque. Elle est ensuite déclinée en Europe sous les marques Peugeot et Citroën.
En 2022, le segment se relance avec l’arrivée de la Nissan Sakura et de la Mitsubishi eK X EV. Ces modèles 100 % électriques utilisent une batterie de 20 kWh et offrent une autonomie d’environ 180 km. Leurs tarifs attractifs et les subventions gouvernementales en font des options populaires dans les grandes villes.
Fiscalité et assurance : toujours avantageuses
Malgré les hausses récentes, les Kei Cars restent globalement plus économiques. L’impôt d’achat est de 2 %, contre 3 % pour une voiture classique. Le coût de l’assurance, de la taxe de poids et de la taxe de circulation reste inférieur de 30 % à celui d’un véhicule de taille standard. Ces économies continuent de séduire les jeunes conducteurs et les ménages urbains.
Les Kei Cars ont su traverser les décennies en s’adaptant aux contraintes techniques, économiques et environnementales. De solutions pratiques dans un Japon d’après-guerre à véhicules compacts et technologiques d’aujourd’hui, elles restent une composante essentielle du paysage automobile japonais. Leur avenir pourrait bien se jouer sur le terrain de la mobilité électrique et connectée, avec toujours cette même promesse : une mobilité accessible, ingénieuse et parfaitement intégrée à la vie urbaine japonaise.
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